L'héritage d'Amy Winehouse

Même si à l'époque, ses fréquentations douteuses, ses addictions à l'alcool et à la drogue font le bonheur des tabloïds, son style neo-jazz et soul ouvrira la voie à d'autres artistes féminines aux grandes voix, comme Duffy ou encore Adele. Issue d'une famille juive du nord de Londres, ses parents se séparent alors qu'elle n'a que 14 ans. Biberonnée au jazz et fan de pop et hip-hop, elle devient alors élève à la prestigieuse école musicale et artistique, la Brit School, avant de tout quitter à 16 ans pour travailler pour des magazines People et jouer dans de petits clubs. Sa voix et son côté brut de décoffrage la démarquent tout de suite. Elle signe avec l'équipe de Simon Fuller, ancien manager des Spice Girls, et en 2003, elle sort son premier album, Frank.

Les critiques sont dithyrambiques et lui permettent de se faire une place dans le monde du jazz. Elle assure les premières parties de Jamie Cullum et on la compare déjà à Sarah Vaughan. Cet album lui permet d'être nommé au Brit Awards et elle est récompensée au Ivor Novello Awards, cérémonie pour les auteurs-compositeurs outre-manche. 

Pour son deuxième disque, Amy se plonge dans les albums de groupes de filles 50's et 60's et en particulier The Ronettes. Joyaux de l'écurie Phil Spector, super producteur du "Mur du Son", porté par la voix de Ronnie Spector qui, elle aussi, est un petit bout de femme à la voix spectaculaire. Des chansons d'amour parfois torturées sur fond d'orchestres live ainsi que leur côté bad girl avec des jupes ultra courtes et des tonnes d'eyeliner font partie de la marque de fabrique des Ronettes. Amy Winehouse s'inspire entre autres de leur coupe de cheveux, la "Beehive", architecture capillaire qui en France est plus communément appelée la "choucroute". Ronnie Spector dira plus tard être tombé sur un article consacré à Amy et avoir cru se voir elle-même. 

En mai 2006, Amy s'envole pour Brooklyn pour enregistrer avec les Dap-Kings, groupe de Funky Soul et un producteur encore peu connu du grand public, Mark Ronson. Dix mois plus tard, le résultat est une véritable claque. Rempli de textes crève-cœur, d'amour compromis, Back to Black est un album à cœur ouvert qui consacre Amy Winehouse des deux côtés de l'Atlantique et lui vaudra 5 Grammy Awards en 2008. Mais ses addictions et ses troubles alimentaires signent sa descente aux enfers sous les objectifs des paparazzis qui guettent l'arrivée de ses ballerines sales à chacun de ses déplacements. Elle décède en 2011 à 27 ans, laissant un héritage musical fort et surtout une histoire édifiante, comptée dans un biopic qui sort cette année. 

En 2024, parmi les voix britanniques qui semblent se préparer à une conquête mondiale du calibre d'Amy, on retrouve Raye, dont l'ascension a commencé tranquillement en 2014. Bercée dans sa jeunesse par Lauryn Hill, Ella Fitzgerald ou encore Lady Gaga, son univers musical mélange soul, dance et hip-hop. Elle est aussi issue de la Brit School, elle a assuré les premières parties de Lewis Capaldi et son album de 2023, My 21st Century Blues, lui vaut d'être nommé pour 7 Brit Awards, un record.

Ses textes sont parfois très proches de ceux d'Amy, parlant de relations malsaines et parfois inappropriées avec des hommes plus âgés. Elle a aussi déjà connu des épreuves avec l'addiction, l'anxiété et des maisons de disques peu scrupuleuses. On lui souhaite une carrière plus longue et moins douloureuse que celle d'Amy. Voici un de ses derniers titres en live au Royal Albert Hall à Londres, Raye avec Worth It.