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Dossier 90667 Les Stones à Redlands

Fabrice Epstein nous plonge au cœur de l'affaire "Les Stones à Redlands", un scandale retentissant qui a secoué l'Angleterre puritaine des années 60. Entre descentes de police orchestrées par la Drug Squad et médias en quête de sensationnel, Mick Jagger et Keith Richards se retrouvent au centre d'un procès explosif.

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Crédit : RTL2

Dossier 90667 Les Stones à Redlands

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Fabrice Epstein - édité par Mathias Elena

Redlands, un tout petit nom pour une très grande affaire. Redlands, c'est le nom du domaine acquis en 1966 par Keith Richards, le guitariste des Rolling Stones, pour se ressourcer dans le Sussex, loin du bruit et de la fureur de monde. Mais c'est aussi le nom de l'affaire qui conduisit Mick Jagger et Keith Richards, les Glimmer Twins, une nuit en prison.

C'est que l'Angleterre est une terre de puritanisme, un savant mélange de pudibonderie et d'hypocrisie. Devant l'essor d'une culture rock anticonformiste et provocatrice, menée par les Stones, Eric Clapton et bien d'autres encore, l'establishment, la bonne société, tremble. Ce qui terrifie les vieilles familles anglaises, c'est notamment l'usage de la drogue. Pour se protéger, le ministère de l'Intérieur charge Scotland Yard, la mythique police, de mettre sur pied une équipe spécialisée, la Drug Squad, dirigée par un jeune loup, Norman Pilcher. Pilcher aime la lumière. Et pour la prendre, il met au point une fructueuse collaboration avec les médias de bas étage. Sa tactique, convier les médias aux descentes spectaculaires de la drug squad. Et pour s'assurer que les descentes sont toujours couronnées de succès, Pilcher n'hésite pas à placer, avec adresse, de la drogue sur les lieux du délit. Diabolique, n'est-ce pas ?

Sa première victime se nomme Donovan, un gentil folkeux qui ne cache pas son goût pour le hashish libanais. Puis, John Lennon. Mais son trophée, ce seront les Stones. Le flagrant délit aura lieu à Redlands. Pilcher y a introduit un indic. Et l'information lui vient par le chauffeur de Keith Richards. Le 12 février 1967, Richards a convié le gratin dans son prestigieux manoir. Et il y aura de la drogue. Pilcher trépigne. Il contacte le tabloïd News of the World. Depuis que Jagger a annoncé qu'il les attaquerait en diffamation pour avoir précisé qu'ils se droguaient, le journal cherche de quoi se défendre contre lui.

12 février 1967. Redlands, petit matin. Richards, encore sous l'effet de l'acide, voit apparaître de petits nains bleus. Ils sont environ une quinzaine, ils fouillent les convives, mettent la maison sans dessus dessous. Ils trouvent des joints, des amphétamines dans les poches de Jagger et quelques cachetons d'héroïne. Au passage, s'écrit une légende. Une femme flic ouvre la porte d'une chambre et tombe nez à nez avec Marianne Faithfull, la compagne de Jagger, nue, légèrement entourée d'une couverture en fourrure. La presse qui oppresse titre. "Fille nue à la partie des Stones". Le scandale est majeur. Il y aura un procès, mais avant qu'il ait lieu, et sur un coup de tête, les Stones filent en Bentley pour le Maroc.

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Le 10 mai 67, Mick et Keith sont mis en accusation. Le 27 juin, débute le procès de Redlands au tribunal de Chichester. C'est un cadre digne de l'Angleterre des années 30 qui accueille Mick et Keith qui sont sur leur 31. Le président de la cour, le juge Bloch, donne le ton. Il insulte Richards, le traite de racaille, de saleté. Il va même jusqu'à lui dire que les gens comme lui ne devraient pas se promener en liberté. Mais Keith n'en a que faire, il est à la hauteur de la jeunesse rebelle qu'il incarne. Oui, qu'une fille se balade nue chez moi, ça ne me choque pas plus que ça. Je me moque de votre morale étriquée, c'est clair, et ça ne plaît pas au juge. Verdict. Mick Jagger est condamné à trois mois de prison, Keith à un an et à une amende. Exécution provisoire. Direction la prison. Romwood Scrubs pour Keith, Brixton pour Mick. Le lendemain, les deux Stones sortent de la tôle, leurs avocats ont fait appel. Au passage, ils prennent la pose pour l'éternité et tout sourire entouré de leur manager Alan Klein, qui sait que la férocité de la justice ne pourra que profiter aux enfants terribles du rock.

Face à la sévérité de la peine, l'opinion publique s'insurge. Les fans hurlent, les Who reprennent deux chansons de leurs potes pour les soutenir. Et la presse, enfin, se fait entendre. Le 1er juillet 1967, le très influent rédac chef du Times, William Rees Moog, publie un édito au titre évocateur "Qui fait passer un papillon aux supplices de la roue ?". Il relève que cette sentence est absurde. Surtout, il se demande si Jagger n'a pas été condamné plus sévèrement que s'il avait été Monsieur Tout-le-Monde. L'article fait grand bruit. Un mois plus tard, la cour d'appel commue la peine de Jagger en un an de sursis et annule celle de Richards, faute de preuves. Avec ce procès, les Stones sont devenus des héros nationaux. Ils restent et resteront la hantise d'un establishment sur le point de s'effondrer. Le crime a profité aux pierres qui roulent. Encore et encore, telle est la loi du rock.

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