Peut-être avez-vous déjà croisé son profil au détour d'un clic, longiline et pâle, avec des cheveux sombres et un nez aquilin. Des photos dévoilant un univers visuel sombre et glaçant, dont l'une où il porte un T-shirt au slogan clair : "Anti hero". Alex Sindrome a 43 ans et travaille dans la publicité à Paris. Sur Internet, il répand sa "pop noire électronique" qui ne laisse pas indifférent, cisaillée aussi bien dans les textes que dans les mélodies. Son troisième album, Pop Polaroïd , est sorti en septembre 2015. Alex Sindrome s'intéresse à la musique vers neuf ou dix ans, à une époque où il y a "un peu partout des sons nouveaux et des univers très forts". Il cite Alain Bashung et Polnareff pour la France, Thriller de Michael Jackson et Purple Rain de Prince pour l'international. "J’écoutais ces disques non stop, c’était de l’obsession", se souvient-il auprès de RTL2.fr . Mais ce n'est qu'à partir de 2002 qu'il commence à composer de son côté, d'abord pour s'amuser et pour ses amis. Une "pop noire électronique". Quelques années plus tard, Alex Sindrome partage sa musique sur la première version de MySpace . S'il dit écouter "de tout", Sindrome développe une musique bien particulière. Des textes défaitistes, parlés , voire même, déclamés avec une voix mécanique, presque robotique. Les productions sont léchées , principalement électroniques, tendance new-wave. "Une des premières chroniques de Sindrome publiée parlait de 'pop noire électronique' et ça me semble bien refléter ce que je fais", estime le chanteur et compositeur, qui n'a aucun problème avec le terme "pop music". Son troisième album, Pop Polaroïd , Sindrome l'a voulu "plus lumineux et dynamique, un genre de pop dancefloor teinté de rock très décomplexée". Il a pris un an pour réaliser un disque qu'il voulait "riche, avec des textes forts". Il s'agit à ce jour de son plus gros succès en terme de ventes physiques et numériques. Il en avait présenté le titre Lacenaire en mai 2015. Sindrome est réceptif à tout ce qui l'entoure. Dans son disque Superdition , on peut trouver le morceau Tous à la Batmobile ! Cette fois, l'univers de Batman est comme un miroir tendu à la société actuelle. "Cette chanson dont le refrain dit : 'Ce soir on quitte la ville, tous à la Batmobile', c’est vraiment une incitation à la fuite du réel dans l’imaginaire, et même, dans l’absurde , explique Sindrome. Une invitation à se laisser aller, à tourner momentanément le dos à ce monde qui nous entoure et nous désole.". Un artiste confidentiel. Cependant, ne cherchez pas Pop Polaroïd sur les sites de streaming ou de vente musicale, vous ne le trouverez pas. Il faudra vous rendre sur les pages Facebook , Bandcamp , Soundcloud et YouTube de Sindrome. Celui-ci se considère comme "très underground, dans la mesure où (il) reste un parfait inconnu pour la plupart des gens" et n'est pas présent sur les plateformes musicales usuelles. Mais ce n'est "pas vraiment" par volonté que Sindrome reste "sous le radar". "Je dois reconnaître que je cumule deux gros défauts qui sont lourds de conséquences dans ce milieu : je suis peu enclin aux compromis et je ne démarche pour ainsi dire jamais les médias, quels qu’ils soient ", résume l'artiste. Il a par exemple refusé de modifier les paroles de certaines chansons, ce qui lui a fermé les portes d'une grosse maison de disque. Plus surprenant encore : il ne donne pas de concerts . "Je suis de nature très réservée et infiniment plus à l'aise dans un studio d'enregistrement confiné, à bidouiller des sons, traquer la bonne ligne mélodique et créer de la musique que sur une scène devant une assemblée de personnes qui m'observent à la reproduire", justifie Sindrome, qui a préféré répondre à nos questions par mail plutôt que de vive voix. Ses interactions avec le public ont donc essentiellement lieu en ligne. " Sur Facebook, les fans me parlent comme à un type normal dont ils apprécient les œuvres , pas du tout à un artiste sur son petit piédestal, se félicite le chanteur, qui interagit souvent avec ses admirateurs. J’ai par ailleurs la chance d’avoir des fans très militants qui suivent mon parcours de très près et sont très réactifs.". Gainsbourg et Sirkis dans son sillage. Même s'il se revendique comme affilié à la scène "underground", Sindrome a croisé la route de quelques grands noms de la scène française. Serge Gainsbourg , tout d'abord, rencontré grâce à son père, également publicitaire, et avec lequel il a pu passer ses vacances à l'été 1982. " Mon caractère et mes centres d’intérêt l’intriguaient , se souvient Sindrome. Il me parlait aussi beaucoup de sa fille qui avait mon âge, me disait qu’on s’entendrait bien par ce qu’elle aussi avait 'la chance de ne pas être simple'." Plus tard, c'est avec Nicola Sirkis que Sindrome va tisser des liens. Les deux hommes se rencontrent en 1998. Sindrome souhaite alors écrire un article sur le recueil de nouvelles que vient de publier le chanteur d'Indochine. Ce dernier l'accueille chez lui pour en discuter. "On a parlé littérature pendant un bon moment. Je connaissais Indochine comme tout le monde mais sans plus à l’époque, assure Sindrome. C’est surtout Nicola qui m’a humainement plu à partir de cette première rencontre." Lorsque Sindrome commence ses propres compositions, vers 2002, il fait parvenir quelques maquettes au chanteur. Sirkis lui conseille de s'attacher aux textes : "Autour de moi, pas mal de monde pensait différemment mais c’est lui que j’ai écouté et c’est finalement à cause ou grâce à lui que le projet Sindrome a vu le jour." Les deux hommes sont toujours en contact.