Bruce Springsteen a écrit les plus belles pages de sa légende sur scène. Icône du rock, performer inégalable, le chanteur de 66 ans est l’auteur de très grands disques (The River, Nebraska, etc), mais c’est d'abord au contact de son public, qu’il prend toute sa mesure. À l’âge où tant d’artistes donnent des concerts laborieux en traînant les pieds, lui livre des shows extraordinaires jusqu’au bout de ses forces. Tel un gladiateur. Trois ans après une date mémorable au Stade de France, le "Boss" s’est produit lundi 11 juillet à l’AccorHotels Arena dans une ambiance surchauffée. Un second spectacle est prévu le 13.
Springsteen connaît parfaitement l’enceinte de Paris-Bercy pour y avoir donné des dizaines de concerts tout au long de carrière. Comme d’habitude, pas de première partie, le chanteur déboule sur scène très tôt, vers 19h40. Seul. "Bonjour Paris, comment allez-vous ?", lance Springsteen dans la langue de Molière. Puis, il se glisse derrière le piano et entonne Incident on The 57th Street, titre de son deuxième album The Wild, the Innocent & the E Street Shuffle (1973). Une ballade déchirante, complexe, qui raconte l’histoire de Spanish Johnny et Puerto Rican Jane dans un New York à la West Side Story. Un moment suspendu, magique, de pure poésie, qui tranche avec les habituelles entrées en matière de Springsteen qui a tendance à vite faire hurler sa guitare. Le groupe rejoint ensuite la star. Springsteen saisit son harmonica pour une rareté, Reason To Believe, jouée pour la première fois sur cette tournée.
Cheveux courts, foulard noué autour du cou, gilet gris, le look de Springsteen ne bouge pas d'une tournée à l'autre. L'âge ne semble pas avoir d'emprise sur lui non plus. On lui donnerait 10 ans de moins. Sa voix rocailleuse si caractéristique est toujours aussi phénoménale. La scène est également identique depuis des décennies. Sans décor, uniquement surplombée de trois grands écrans géants. Mais pas le temps de s’attarder. Springsteen enchaîne avec Badlands ! Toute la salle se lève d’un bloc, exulte. Le public reprend les fameux "Ooooh Oooh" sur la fin du titre. Le Boss fait durer le plaisir. C’est rare qu’il joue ce classique si tôt dans le set.
Retour au calme, Springsteen interprète Into The Fire. La chanson apparaît sur The Rising, son disque écrit dans la foulée des attentats du 11 septembre 2001. Le morceau rend hommage au sacrifice des pompiers et des policiers intervenus. Bruce Springsteen est une nouvelle fois entouré de son légendaire E Street Band, le groupe avec lequel il s’est fait un nom au milieu des années 70. La bande qui a lui a permis de se tailler une place à part dans le panthéon de l'histoire du rock. Ils sont 9 sur scène. De la formation initiale subsistent le bassiste Garry Tallent, le pianiste Roy Bittan, Max Weinberg le batteur, le fameux guitariste Steven Van Zandt "Miami Steve" (vu dans la série Les Soprano), l’autre guitariste, Nils Lofgren et Patti Scialfa, la compagne du chanteur.
20h15, les premières notes de The Ties That Bind retentissent. Il s'agit du titre qui ouvre l'album The River, son double album culte, publié en 1980, celui qui a permis à Springsteen de conquérir le Vieux Continent. L'un de ses chefs-d'œuvre. Sa nouvelle tournée est d'ailleurs une célébration de ce monument du rock auquel l’artiste a consacré un long documentaire et un coffret rempli d’inédits et de documents rares fin 2015. La star joue presque tous les titres du disque (15 sur 20) dans l'ordre d’origine. Sherry Darling, Jackson Cage… Sur Two Hearts, le Boss chante en duo avec "Miami Steve", comme un seul homme, face collée contre le micro. Avant de reprendre Independence Day, Springsteen s'adresse au public en français : "C'est la première chanson que j'ai écrite sur un fils et son héros".
Pendant Hungry Heart, l’éternel showman tend le micro à la foule qui reprend chœur le premier couplet. Une tradition en live. Puis Springsteen descend dans la fosse au plus près de ses fans. Crush On You, You Can Look (But You Better Not Touch)... Puis, Death To My Hometown avec sa rythmique irlandaise, première digression de la soirée. Un titre faussement joyeux de son dernier album sur la crise économique qui a frappé tant de villes aux États-Unis. Une chanson qui rappelle l'engagement politique inaltérable de Springsteen. Le chanteur a tant écrit sur les cols bleus, les working poors, les plus faibles, les oubliés de l’Amérique.
21 heures, Springsteen reprend Nebraska seul à la guitare acoustique. Le public retient son souffle. Puis The River, peut-être le titre le plus émouvant de sa carrière, un sommet de songwriting, dont tout le public connaît la moindre parole. La pierre angulaire de l'album éponyme auquel Springsteen rend hommage dans l'enceinte de l'AccorHotels Arena. Grand moment. Le Boss poursuit son hommage à l’album The River dans la foulée. Point Blank, hypnotique, puis The Rocker, au cours duquel l'infatigable chanteur prend une fan dans les bras après avoir remarqué son panneau sur lequel est écrit : "J'ai promis à mon père de faire un câlin au Boss". 21h59, des notes de piano connues. Because The Night, le titre offert par le Boss pour Patti Smith et qu'il reprend désormais avec passion. "Parce que la nuit nous appartient", gueule en anglais le public.
Après une version habitée de Land of Hope and Dreams et 2h30 de concert, Springsteen quitte la scène. En attendant son retour, les spectateurs reprennent le pont de Badlands spontanément. Premier rappel. L’immense Jungleland débute. Un morceau de bravoure, l’un des titres phares de l'album qui a lancé la carrière de Springsteen : Born To Run. C'est justement le tube du même nom qui succède. Les lumières se rallument, l'impression est saisissante. Une marée humaine entoure Springsteen et son groupe. Born To Run est repris dans une communion totale entrecoupée de soli de saxophone irrésistibles signés par Jake Clemons, le neveu du regretté Clarens Clemons, saxophoniste et père fondateur du E Street Band, disparu le 18 juin 2011. Il est habité par la même passion que lui.
Et puis, au beau milieu de Ramrod, l’incident de la soirée : la sono disjoncte complètement. Un message d’alerte retentit dans la salle. Surréaliste. Le concert est arrêté de longues minutes. Le public ne veut pas quitter la salle et applaudi à tout rompre, chante pour combler l’attente. Puis après au bout d'un suspens interminable, le son revient enfin. Springsteen lance "Quelle heure est-il ?" Le public répond à l’unisson : "L'heure de Bruce !" La star termine Ramrod. Lumières toujours allumées, le Boss illumine la soirée avec un Dancing in The Dark, avant d’enchainer avec une cover de Shout des Isley Brothers jouée en boucle pendant une dizaine de minutes.
Suit ensuite Bobby Jean, l’un meilleurs morceaux de l’album Born in The U.S.A., dont il ne jouera pas, comme souvent, le fameux tube mal interprété qui l’a propulsé dans les charts. "Merci Paris, on vous aime. Quelle belle nuit, rien ne peut arrêter le E Street Band. Merci d'être resté avec nous." Springsteen termine le concert, comme il l’a commencé : seul sur scène avec pour ultime cadeau une sublime version de Thunder Road face à un public envoûté, et un peu en sueur après un show marathon de 3h48 ! Un concert dores et déjà inscrit dans le grand livre des exploits du Boss.
La setlist
1. Incident on 57th Street
2. Reason To Believe
3. Badlands
4. Into The Fire
5. The Ties That Bind
6. Sherry Darling
7. Jackson Cage
8. Two Hearts
9. Independence Day
10. Hungry Heart
11. Out in the Street
12. Crush on You
13. You Can Look (But You Better Not Touch)
14. Death To My Hometown
15. Nebraska
16. The River
17. Point Blank
18. Cadillac Ranch
19. I'm a Rocker
20. Darlington County
21. Tougher Than The Rest
22. Drive All Night
23. Because The Night (reprise de Patti Smith)
24. The Rising
25. Land of Hope and Dreams
Rappel 1
26. Jungleland
27. Born To Run
28. Ramrod
29. Dancing in The Dark
30. Tenth Avenue Freeze-Out
31. Shout (reprise de The Isley Brothers)
32. Bobby Jean
Rappel 2
33. Thunder Road
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