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VIDÉOS - Comment Noir Désir a marqué le rock français en 13 titres

Avec un style nouveau et unique en son genre, Noir Désir a laissé une trace indélébile dans l'histoire du rock français. Retour sur l'histoire d'un groupe hors norme.

Noir Désir aux Victoires de la musique en 2002.
Crédit : BERTRAND GUAY / AFP

"Conjuguer Rimbaud avec les Doors et Mallarmé avec les Clash." Telle est l'ambition de Noir Désir résumée par Marc Besse, qui retrace l'histoire du groupe dans À l'envers, à l'endroit (ed. Ring). En près de 30 ans de carrière, de sa formation au début des années 1980 jusqu'à son éclatement en 2010, la bande menée par Bertrand Cantat a laissé une trace indélébile dans le rock français, qu'il a dominé et qu'il continue toujours d'influencer.

Noir Désir commence par une rencontre, une sorte de coup de foudre amical et musical sur les bancs de l'école entre Bertrand Cantat, tout juste arrivé à Bordeaux, et Serge Teyssot-Gay, un passionné de musique. Ils forment Noirs Désirs avec Denis Barthe à la batterie, et tentent de se faire un nom dans la foisonnante scène bordelaise. Le batteur se souvient de leurs débuts : "Quand on a commencé, il y avait quand même plus de six cent groupes qui étaient recensés, c'était une ville de rock à l'image pure et dure". 

Des débuts tonitruants

Alors après quelques allées et venues de ses membres (Cantat quitte la formation de 1983 à 1985), les compères enlèvent les "s" de leur nom et deviennent Noir Désir dans sa forme (presque) définitive : Bertrand Cantat (Chant/guitare/harmonica), Serge Teyssot-Gay (guitare), Denis Barthe (batterie) et Frédéric Vidalenc (basse). Très vite repérés par une major, ils signent chez Barclay et enregistrent un premier "mini-album" de six titres qui s'intitule Où veux-tu que j'regarde ? (1987). Devant le potentiel qu'offre le groupe, leur label les signe pour trois disques supplémentaires, dont le premier sortira deux ans plus tard. 

En 1989, Veuillez rendre l'âme (à qui elle appartient) propulse véritablement Noir Désir sur le devant de la scène. L'album, porté par le tube Aux sombres héros de l'amer, connaît un succès immédiat et dépasse les 100.000 ventes, ce qui équivaut à un disque d'or à l'époque. La tournée qui suivra se conclura à l'Olympia. La carrière des Bordelais est lancée. Pourtant, ces derniers refusent de rentrer dans "le système" et de prendre la grosse tête. "Il n'était pas question d'aller jouer le tube dans toutes les émissions de prime-time. Qu'est-ce qu'on a loupé comme soirées formidables ! Il fallait choisir, alors on a choisi", expliquent les membres du groupe dans le livre de Marc Besse. Une ligne à laquelle ils se tiendront jusqu'au bout, privilégiant chaque fois quelques rares interviews à la presse écrite plutôt que de faire le tour des plateaux télévisés.

Le tournant "666.667 Club"

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Profitant de l'élan de leurs deux premiers albums, les rockeurs enchaînent les sorties avec Du ciment sous les plaines en 1991 suivi de Tostaky l'année suivante. La chanson éponyme de ce quatrième opus est un condensé de l'esprit de "Noir Dez" : des textes forts alliés à une pure énergie rock. À la fin du morceau, on peut même entendre Bertrand Cantat s'égosiller sur les paroles, comme Kurt Cobain dans Territorial Pissings de Nirvana sorti quelques mois plus tôt. L'enchaînement des concerts pour promouvoir Tostaky va épuiser le groupe. Et si la tournée débouche sur un album live, Dies Irae, elle sera aussi suivie d'une longue pause. Poussée dans ses derniers retranchements, la voix du chanteur s'éteint totalement. Il sera interdit de scène pendant un an par un médecin, qui lui conseille fortement de changer sa manière de chanter. Pendant cette convalescence, Serge Teyssot-Gay en profite pour mener un autre projet en parallèle et sort un album solo. 

Pour leur grand retour après presque un an d'absence, les Noir Désir ont la ferme intention de proposer quelque chose de nouveau. La pause aura apporté un premier changement : Jean-Paul Roy a remplacé Frédéric Vidalenc à la basse. Musicalement, les membres du groupe sont plus matures, mais ils veulent conserver leur esprit rock 'n' roll. Après deux mois d'enregistrement, 666.667 Club est dévoilé au public. Désormais, la rage qu'ils exprimaient par le volume se traduit dans la musique, et surtout dans les textes. "Les mots vrombissent désormais une conscience politique, citoyenne", écrit Marc Besse. 

À l'aube du nouveau millénaire qui s'annonce, et alors que les premiers mouvements alter-mondialistes commencent à se former, Noir Désir chante Fin de siècle. Dans cette chanson, Bertrand Cantat évoque "le grand déversoir des images cyniques à boire à plein tube cathodique", avant de demander à la société qui se globalise : "Attendez-moi (...) n'allez pas si vite." Le groupe dénonce les excès de la société de consommation, brossant le portrait d'un Homme pressé "riche, très riche", et imagine Un jour en France où l'extrême droite serait à 15% dans les urnes. Un tableau pas si éloigné de la réalité puisque Jean-Marie Le Pen sera au second tour de la présidentielle huit ans plus tard.

Le disque déclenche une véritable tornade, s'écoulant à plus d'un million d'exemplaires. Une première pour un groupe de rock français, et un record jamais égalé pour ce registre musical. Ils s'engagent alors de plus en plus, notamment en donnant un concert à Toulon, ville passée sous la houlette du Front national. Le groupe y participe afin de "penser l'alternative, non seulement au Front national, mais aussi à l'ultralibéralisme qui fait le lit du fascisme", disent ses membres dans un communiqué. Rebelote quelques mois plus tard à Vitrolles, dirigée par Catherine Maigret. Par la suite, Noir Désir se fera plus discret, même s'il se fera remarquer lors d'un concert de soutien à José Bové et aux Victoires de la musique en 2002 (après avoir remporté deux distinctions).

Mais le groupe n'oublie pas sa vocation première : la musique. La tournée qui suit 666.667 Club est un franc succès. Et une fois encore, elle suscitera chez les membres du groupe la nécessité de faire une pause une fois la série de concerts terminée. Ces derniers en profiteront pour lancer un appel aux musiciens tous styles confondus pour revisiter leurs chansons. Cela aboutira à One trip/One noise en 1998, dans lequel on peut entendre Yann Tiersen sur À ton étoile, ou encore une version électronique de Tostaky par Télépopmusik.

Sitôt les années 2000 entamées, après une collaboration avec Bashung - sur le titre Volontaire - Noir Désir rentre en studio et offre Des visages des figures, un album parsemé de nombreux tubes, à commencer par Le vent nous portera. Le disque, qui s'écoule à 600.000 exemplaires, peut également compter sur Des armes, une mise en chanson du poème antimilitariste de Léo Ferré ; Lost, qui peut être interprété comme la suite de Fin de siècle, et Le grand incendie, tristement prémonitoire puisque composée à New York quelques semaines seulement avant les attentats du World Trade Center après une visite de celui-ci. À l'envers à l'endroit est aussi une preuve supplémentaire du talent d'écriture de Bertrand Cantat.

Mais un drame va venir interrompre la carrière du groupe. Le 27 juillet 2003, Bertrand Cantat est arrêté à Vilnius en Lituanie après une violente bagarre avec sa compagne, l'actrice Marie Trintignant, qui décède de ses blessures quelques jours plus tard. Le chanteur de Noir Désir sera jugé et condamné à 8 ans de prison. Il sortira le 16 octobre 2007 sous liberté conditionnelle, sa peine ayant été réduite pour bonne conduite.

Se pose alors la question du retour à la musique. L'artiste veut se faire discret et entend y aller petit à petit. Il commence par prêter sa voix aux chœurs de ses amis du groupe Eiffel. Une réapparition qui donne envie aux membres de Noir Désir de retourner en studio. Ils enregistrent Gagnants/Perdants, qu'ils postent sur leur site internet avec un simple commentaire : part ça, Noir Désir est au travail." Les fans se mettent alors à rêver d'un nouvel album. Samedi 2 octobre, Bertrand Cantat monte même sur scène, en public, toujours aux côtés de ses amis d'Eiffel lors du festival Terres neuves à Bègles.

Mais le mardi 30 novembre 2010, un communiqué de Serge Teyssot-Gay met fin à tout espoir. "Je fais part de ma décision de ne pas reprendre avec Noir Désir, pour désaccords émotionnels, humains et musicaux avec Bertrand Cantat", écrit le guitariste. Depuis, l'ancien chanteur et leader du groupe a amorcé un retour en douceur, jusqu'à la sortie du premier album de son nouveau projet, Detroit, avec Pascal Humbert. "Pendant ce temps-là, quinze chansons de Noir Désir pleurent en souffrance de poésie dans des ordinateurs en manque de souffle", conclut Marc Besse dans son ouvrage. Les fans peuvent donc garder un espoir, aussi mince soit-il.

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